GARDER ESPOIR APRÈS UN ARRÊT DE GROSSESSE SPONTANÉ


Aujourd'hui je reviens par ici avec un article très personnel, pour lequel j'ai eu besoin de beaucoup, beaucoup de temps à écrire. Cela fait maintenant deux ans que j'ai vécu un arrêt de grossesse spontané, ou ce qu'on appelle grossièrement une "fausse couche". Mais je n'aime pas ce terme : il me met clairement mal à l'aise, car rien de ce que j'ai vécu n'était faux, bien au contraire. On remonte à juillet 2023, où après presque 7 mois d'essais bébé (ce qui est peu avec le recul...), apparait enfin : LE test positif. Celui tant attendu chaque mois, qui devenait une énorme source d'angoisse, de stress, de déprime et de tristesse au fil que les mois passaient alors qu'il n'affichait qu'une seule barre. Ce fameux test, que l'on rêve toutes de voir apparaitre en positif, dès le premier mois d'essai. Mais dans les faits... rares sont les chanceuses pour lesquelles cela arrive "du premier coup" ! Et ça, j'ai mis beaucoup de temps à le réaliser.
 
Chaque mois, c'était une nouvelle chance, une nouvelle opportunité. J'étais dans l'espoir, l'attente, à m'imaginer que "cette fois-ci : c'est la bonne, je le sens". Sept mois, c'est peu. Mais c'est à la fois beaucoup. Beaucoup pour celle qui attend l'arrivée de cette grossesse plus que tout. Qui s'enferme dans sa bulle, seule, avec son chéri, face aux échecs mensuels. Celle pour qui voir arriver ses règles est vécu comme un deuil. Le deuil que ce ne sera pas cette fois-ci. Avancer sans savoir réellement si finalement notre corps en est capable, si c'est notre mental qui bloque tout le processus, lire tout, n'importe quoi, commencer à carrément être jalouse de voir des femmes inconnues enceintes dans la rue. Un cercle vicieux s'était formé tout autour de moi. J'étais devenue obsédée. Je ne voulais plus travailler, sourire, profiter de la vie, car j'avais l'impression que je ne méritais peut-être pas de devenir maman. Rôle dont je rêvais. On se remet en question, beaucoup. Peut-être que des blocages m'empêchaient d'avancer ? J'ai arrêté ma marque de bijoux, pensant que celle-ci me prenait trop d'énergie et bloquait ce nouveau projet de vie personnelle. Et puis les mois passaient, et toujours le même résultat : rien

Le corps médical nous dit "d'attendre au moins un an avant de vous inquiéter, vous êtes jeunes !". Mais ils ne se rendent pas compte à quel point ça peut être difficile psychologiquement ? Surtout que quand on se lance en projet bébé pour la toute première fois, on n'en parle rarement à son entourage et que de ce fait, on se sent extrêmement seule ? J'étais clairement à bout. Après plusieurs mois de tentatives en vain, je me posais vraiment la question du : "est-ce que je suis assez solide pour encaisser ces échecs encore des mois... voire des années ?". J'ai versé énormément de larmes pendant ces longs mois, seule, dans mon coin. 
 
On lit un peu de partout que "ne pas y penser est le meilleur moyen d'y arriver, partez en vacances !". D'accord. On essaye de ne pas y penser, surtout au début où ne se prend pas trop la tête car on sait que ça va arriver. On enchaîne les voyages, on profite de notre vie à deux en couple. On se dit que ce temps est finalement un cadeau et que le moment venu, bébé arrivera tout seul ! Et puis... rien. Alors on se met à regarder son cycle d'un peu plus près... à calculer un peu tout, à faire des tests d'ovulation chaque mois pour que ça soit encore plus précis que les nombreuses applications pour le suivi des cycles... et toujours rien. Je crois que ça a été l'une des périodes les plus difficiles que j'ai vécue psychologiquement. Heureusement, nous étions une équipe. Je partageais mes déceptions et mes peines chaque mois avec mon chéri, qui était d'un soutien et d'un optimisme sans faille. J'avais tellement hâte de lui annoncer la bonne nouvelle. Et puis finalement, après 7 longs mois, la délivrance : je suis enceinte

Je l'ai su avant même de faire un test de grossesse ! C'est une histoire assez folle en vrai. Je crois énormément aux signes depuis toujours et j'y prête beaucoup attention. Lors de mon ovulation, juste avant de tomber enceinte, une coccinelle était dans mon salon. J'ai su. Puis, j'ai décidé de tirer les cartes quelques jours plus tard (oui j'aime bien faire ça quand je me pose des questions existentielles sur mon avenir ou ma vie) avec une question simple et précise : "est-ce que je suis enceinte ?". Quelle ne fut pas ma surprise quand deux cartes se sont mises à littéralement sauter du paquet de cartes : "victoire" + "naissance". Cette fois-ci, il n'y avait plus de doutes. Je le savais au plus profond de mon âme : il n'y avait pas d'autres possibilités, il y avait trop de signes. Mais... c'était encore trop tôt pour le fameux test. Je devais attendre encore une bonne semaine afin de pouvoir faire un test précoce ! Et puis les jours passèrent et le jour J arriva enfin. J'ai acheté plusieurs tests, histoire d'être certaine, et cette fois-ci et pour la première fois il était : POSITIF

La journée fut si longue avant de pouvoir l'annoncer à mon chéri. Cette envie de crier sur tous les toits que ça y est, je suis enceinte bordel ! Cette joie, ce bouleversement d'émotions dans tout mon corps. Nous étions si heureux. On n'y croyait presque plus. C'est ridicule, avec le recul, de ne pas faire confiance en la vie ou en son corps à ce point là quand même... 
 
L'heure des vacances d'été sonna et nous allions dans le sud, annoncer la meilleure nouvelle de notre vie à nos familles. J'étais enceinte de quelques semaines à peine, mais passant toujours le mois d'août là bas, avec eux, ils auraient rapidement vu que j'étais enceinte donc on a préféré leur annoncer plutôt qu'ils le découvrent par mégarde. Après près de 6h de route, nous sommes dans le sud. Je me sens assez fatiguée, alors on fera l'annonce demain. Et puis... le matin j’aperçois un peu de sang. Mais je me dis que c'est le long trajet et la fatigue, que ça a du me perturber. Nous faisons l'annonce. Tout le monde pleure de joie. Nous sommes si heureux. Le lendemain, je perds deux fois plus de sang. J'ai mal, je ne peux plus me mettre assise et encore moins debout. Je ne mange plus, tout est douloureux. Je ne comprends pas. On va consulter, "vous n'auriez pas du faire un si long trajet en voiture, ce n'est pas raisonnable, si vous ne perdez pas plus de sang, ça ira, si vous n'avez pas de douleur intense, ça ira". Mais je savais. Au fond de moi, je n'y croyais déjà plus. Dès les premières pertes, j'ai su que c'était fini. Et puis, la culpabilité que m'a ajouté cette sage-femme, d'avoir "osé prendre la route enceinte!", n'a pas cessé de me poursuivre, encore aujourd'hui, deux ans après. Et si nous n'avions pas pris la route ? J'avais tout gâché. 
 
Et puis ces douleurs, de plus en plus intenses, en 48h je ne pouvais plus marcher, des contractions si fortes (plus fortes que pour mon accouchement, je vous laisse imaginer), mais je me disais que ce n'était pas si douloureux (le corps est incroyablement fort dans ces moments là). Ma belle-mère nous a obligés à aller consulter à l'hôpital afin de savoir ce qu'il se passait. Le trajet de 15mn dura une éternité. Chaque secousse, me tordait de douleur, à tel point que mon corps se mit en mode survie et se bloqua : d'abord mes doigts, figés, crispés, impossible à bouger : je commençais à paniquer de ne plus pouvoir les faire bouger. Puis la douleur continua de figer le reste de mon corps, toujours assis dans la voiture, je ne pouvais plus bouger mes bras, puis mes jambes, et je me voyais perdre connaissance. Mat s’arrêta aux pompiers, avant les urgences... ils ne réussissaient pas à me sortir de la voiture, malgré qu'ils soient 4 hommes. J'étais paralysée et mon corps bloqué en position assise, mon cerveau ne répondait plus. Il avait mis mon corps en pause de survie. Tout me sembla irréel. La douleur était si intense que mon corps stoppa tout ? Comment est-ce possible ? Je n'avais jamais vécu ça. 
 
Ils finirent par me mettre sur un brancard, je revenais petit à petit consciente, tremblante, ne sachant m'arrêter de trembler, et toujours le corps "bloqué". On nous installa en chambre. Une sage-femme arriva, je me vidais de sang (navrée pour les âmes sensibles...). Le verdict tomba enfin : je suis désolée madame... vous avez perdu le bébé. Un soulagement immense me traversa et la douleur disparut, comme envolée. Je le savais déjà avant, mais là, j'avais des mots. 
 
On me demanda souvent, tous les jours, pendant des semaines : comment vas-tu moralement ? J'allais étrangement bien, très bien, de ce coté. J'avais eu tellement mal en l'espace de quelques jours, que les douleurs du corps effaçaient les douleurs du cœur. Et tant mieux. J'étais forcément un peu triste, mais au moins, je n'avais plus mal. Il aura fallu un mois entier en août 2023 à prendre soin de moi, à me reposer, à récupérer de cette épreuve si intense physiquement. Je n'aurai jamais pensé qu'une "fausse couche" puisse faire si mal si tôt dans la grossesse... et le corps médical n'a jamais su m'expliquer non plus le pourquoi du comment j'avais eu de telles douleurs. 

Finalement, notre bébé arc-en-ciel (c'est le nom si joli qu'on donne aux bébés qui arrivent après la perte d'un premier bébé...), arrivera début novembre, trois mois après cet évènement très marquant dans ma vie de femme et de maman. Et c'est drôle, mais je n'étais plus si pressée de tomber rapidement enceinte. Cette épreuve m'avait fait réaliser que les choses arrivent toujours au bon moment, et qu'il ne faut pas presser les choses. Qu'être impatiente n'apporte pas de bonnes choses. Ça m'a permis de beaucoup relativiser par la suite. Même si pour ma grossesse pour Élio, je n'ai jamais été sereine à 100%, avec toujours cette peur, malgré moi, de pouvoir le perdre à tout moment...
 
Pour l'anecdote assez belle je trouve : j'ai perdu ce premier bébé le 3 août 2023, Élio est né un an pile après, jour pour jour, le 3 août 2024... 
 
Je voudrais dédier cet article, ce témoignage si personnel, car je sais qu'il pourra aider certaines d'entre vous, qui essayent, qui luttent chaque jour pour ne pas craquer, qui voient des mamans, des femmes enceintes, et qui ressentent beaucoup de peine, celles qui ne peuvent pas, qui ont perdu un bébé... vous n'êtes pas seules. Même si ça prend du temps, même si c'est douloureux, même si vous avez envie de tout envoyer valser, croyez en vous, croyez en la vie. Chaque étape et épreuve de la vie, aussi difficile soit-elle, est là pour nous enseigner quelque chose.
 
Alors ne lâchez-pas. 
 
Vous êtes plus forte que ce que vous ne croyez. 
 
"Tout est écrit, ça ne sert à rien de s'inquiéter".

Avec beaucoup d'amour et de bienveillance, 
 
Laetitia. 

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